L'envers du décor...

Dans l'imaginaire collectif, être photographe semble être un métier de rêve!

"Tu as de la chance de faire ce que tu aimes!" C'est ce que beaucoup me disent quand ils découvrent ma profession. Pourtant, derrière cette passion, se cache une réalité professionnelle bien différente. Si certains y voient un loisir qui rapporte, la photographie est avant tout un métier exigeant et à part entière. Il est certain que chaque personne a une vision différente du métier de photographe.

Certains vous considèreront comme privilégié, paresseux, voire escroc en facturant plus de 1000€ pour des mariages.

Sur les réseaux sociaux, l'image du photographe semble idyllique, mais la réalité est bien différente alors que la profession est en déclin malgré l'arrivée de nouveaux talents.

J'ai souvent l'occasion de parler des aspects techniques de mon métier. Vous avez probablement déjà lu mes articles sur l'importance d'un bon équipement, les subtilités des logiciels de retouche, et le travail minutieux qui se cache derrière chaque photo parfaite.

Mais aujourd'hui, on va rire un peu... je vais vous emmener dans les coulisses de la photographie professionnelle, là où les lumières sont moins éclatantes 

et où le glamour laisse parfois place à des réalités surprenantes et méconnues.

 

Imaginez-vous naviguer à travers un labyrinthe de moments intenses, ponctué par des douleurs aux pieds après une journée de 15 heures debout, ou encore par des trajets interminables à une heure du matin après un événement épuisant.

Ajoutez à cela les séances d'ostéopathie régulières pour soigner les tendinites, et vous commencez à avoir une idée plus complète de ce que signifie vraiment être photographe.

 

Alors, préparez-vous, je vous emmène avec moi, explorer l'envers du décor de ce métier passionnant mais exigeant, où chaque image raconte une histoire bien plus profonde que celle que vous voyez sur Internet.

Les douleurs inévitables

La photographie exige une force physique que l'on ne soupçonne pas toujours. Les appareils photo et leurs objectifs sont lourds, et porter cet équipement pendant des heures peut rapidement devenir éprouvant.

Une fois passée la quarantaine, la différence se fait sentir plus fortement qu'à nos débuts.

Les douleurs aux mains dues à la fréquence des déclenchements et au poids du boîtier sont monnaie courante. Pour ma part, je vis avec une tendinite calcifiante à l'épaule gauche depuis six ans. Le conseil de mon dernier kinésithérapeute? Changer de métier!!!

Au cours d'une saison, je programme régulièrement des séances d'ostéopathie après chaque événement, et je m'offre parfois un bon massage en institut pour soulager les tensions accumulées.

Être photographe ne se résume pas aux seuls beaux moments... cela implique aussi de vivre des journées exténuantes, souvent debout pendant 10 à 15 heures.

Le lendemain, je donnerais tout ce que j'ai pour trouver comment me procurer de nouveaux pieds.

Mais au delà des "reportages journalistiques", le corps subit des contraintes constantes, qui m'ont conduit à ajuster certaines de mes offres.

Par exemple, j'ai arrêté de proposer le "Posing nourrisson", préférant maintenant les séances photos lifestyle avec votre nouveau-né. Ces séances sont moins exigeantes physiquement et permettent d'immortaliser ces moments purs sans aucun artifice dans un environnement naturel.

Pour les clients qui souhaitent des images "Newborn", je les oriente vers mes consoeurs spécialisées, qui font un travail remarquable.

Ce choix est un compromis pour préserver ma santé tout en continuant à offrir des services de qualité en préservant mon style photographique. 

Alors certes, j'ai un métier passionnant, mais il est important de reconnaître et de gérer les défis qu'il impose.

L'aspect psychologique

Je vous ai déjà parlé de l'aspect physique de la photographie, avec ses longues heures debout et le transport de matériel lourd. Heureusement, cette année, j'ai investi dans une valise à roulettes pour alléger ce fardeau. Mais il y a un autre aspect tout aussi important et souvent négligé : le côté psychologique.

Le moral est crucial pour booster notre créativité, et pourtant, il est souvent mis à rude épreuve.

Un phénomène étrange et pourtant bien réel transforme parfois mes gentilles futures mariées en dragons redoutables le jour de leur mariage. Si, si, je vous l'assure. 

En tant que future épouse, on essaie d'organiser le mariage de nos rêves, un événement qui représente un certain coût financier et beaucoup de stress.

On veut que tout soit parfait et on est persuadé que ce sera le cas.

Je suis passée par là moi aussi, mais je n'ai jamais manqué de respect envers mes prestataires pour autant. Dans la vie, rien n'est jamais parfait, et ce sont souvent ces petites imperfections qui créent les anecdotes les plus mémorables pour plus tard. Il faut apprendre à lâcher prise et à accepter ces imprévus.

Je rencontre mes couples au moins trois fois avant le grand jour. Pour celles qui ont déjà eu l'occasion de m'avoir à leurs côtés, vous savez que je m'investis à 300 % dans votre organisation.

C'est un véritable accompagnement que je propose. Heureusement, 95 % d'entre vous en ont conscience.

Vos messages de remerciement, les avis déposés avant même de voir le résultat, les virements reçus souvent par le marié qui, ayant pris conscience de mon investissement, me remercie de cette façon, les haies d'honneur et autres discours pour saluer mon professionnalisme le jour du mariage en sont la preuve.

Cependant, il y a ce 5 % qui ne le font pas.

Pas le moindre merci, pas la moindre reconnaissance lorsque je dépasse l'horaire prévu sans facturer d'heure supplémentaire.

Mais ce n'est pas seulement une question de politesse.

Hélas, cela va souvent de pair avec une attitude capricieuse que je constate tout au long de la journée.

Les douces princesses peuvent se transformer en gamines capricieuses dès qu'un détail ne se déroule pas comme prévu, même si ce détail n'a rien à voir avec moi, comme l'oubli du bouquet ou un vidéoprojecteur défaillant.

Bien que je ne sois pas responsable de ces imprévus, étant constamment à leurs côtés, c'est souvent sur moi qu'elles passent leurs nerfs, en hurlant ou en m'ignorant.

Ce comportement est détestable, révélant un manque d'éducation et de respect.

Et bien sûr, elles seront les premières à vouloir un résultat parfait.

C'est un défi psychologique supplémentaire que nous, photographes, devons gérer tout en restant professionnels.

Les trajets

Il y a aussi les trajets interminables à effectuer après une journée de travail, qu'elle se soit bien passée ou non. Imaginez-vous rentrer chez vous à une heure du matin, épuisé après avoir couvert un mariage, avec encore une heure de route à faire.

Ces moments sont souvent solitaires et éprouvants, mais ils font partie intégrante du métier.

Il ne faut pas s'endormir, rester vigilante parce que la nuit, nous avons deux dangers potentiels à éviter : les sangliers, qui peuvent provoquer des accidents dramatiques pour eux et pour la voiture, 

et les conducteurs alcoolisés, véritables dangers lancés à pleine allure sur la route.

Originaire du golfe de Saint-Tropez, je connais toutes les astuces pour éviter la circulation.

Cependant, même avec ces connaissances, je dois prévoir beaucoup de temps pour mes trajets afin d'être ponctuelle.

La difficulté de se garer est également un défi majeur.

Bien souvent, à Saint-Tropez, les parkings sont complets. Heureusement, j'ai de la famille sur place chez qui je peux me garer.

De plus, il y a les jours de marché qui tombent souvent le même jour que les mariages, transformant un trajet de 30 minutes en une épopée de une à deux heures.

Je compose régulièrement avec ces défis, en limitant ma vitesse malgré mon irrésistible envie de rentrer chez moi, d'enlever mes chaussures et de prendre une douche.

La fatigue est omniprésente, mais la vigilance est cruciale.

Je ne bois jamais d'alcool, donc ce problème ne se pose pas pour moi, mais je m'assure toujours de ne pas trop manger pour conserver mon énergie.

Ces trajets, bien que fatigants et coûteux, sont une réalité du métier.

Ils représentent un investissement de temps et d'énergie qui, bien que souvent invisible pour mes clients, est essentiel pour assurer une prestation de qualité et un retour en toute sécurité.

Les imprévus

Chaque séance photo a son lot d'imprévus. Les conditions météorologiques peuvent changer brutalement, nécessitant une bonne dose de créativité et d'adaptabilité pour obtenir les meilleures images possibles. Les clients français, par exemple, ont tendance à annuler au moindre petit vent ou nuage, tandis que les étrangers souhaitent créer leurs souvenirs malgré tout et savent qu'un ciel chargé diffuse la lumière de manière unique, offrant d'excellents résultats.

En plus des caprices de la météo, je dois souvent faire face au manque de respect lorsque j'arrive à domicile

pour une séance photo. Il m'est arrivé de patienter 15 minutes devant le portail en plein mois d'août, juste parce que ma cliente "n'était pas prête". Souvent, à mon arrivée, la maison n'est pas rangée, ou manque cruellement de lumière, m'obligeant à travailler dans la pénombre étant donné que je travaille seulement en lumière naturelle.

Parfois, le manque de préparation des clients peut être frustrant. Je me souviens d'une séance récente où j'avais été en contact uniquement avec un membre de la famille, mais à mon arrivée, la grand-mère, une véritable "Tatie Danielle", s'est révélée être particulièrement désagréable.

Pensant que je ne comprenais pas l'italien, elle n'a cessé de faire des remarques négatives sur moi et ma façon de travailler tout au long de la séance.

Sauf que je parle également italien et ai pu comprendre tous ses commentaires désobligeants.

Ces situations, bien que parfois éprouvantes, font partie intégrante de mon travail. Elles exigent une grande patience et un professionnalisme à toute épreuve. 

Courtoisie, patience et professionnalisme

Ah, les événements ! Chaque mariage ou célébration est un véritable festival d'émotions et de rencontres, mais il y a toujours quelques invités qui semblent penser que je suis à leur service personnel, façon esclave des temps modernes. 

Ces braves âmes me sollicitent pour des photos particulières ou des ajustements comme si j'étais exclusivement là pour eux. Avec un sourire courtois, je leur explique que ce n'est pas eux qui m'emploient, mais parfois, il faut savoir poser des limites plus fermement.

Et puis, il y a les tontons photographes. Ces amateurs passionnés pensent toujours pouvoir faire de meilleures photos que moi, se permettant parfois de me donner des conseils. Armés de leurs appareils flambant neufs, ils

s'infiltrent dans mon espace de travail, sans réaliser qu'ils empiètent sur mon territoire professionnel pour lequel j'ai été payé, et où j'ai un devoir de résultat.

J'ai déjà abordé ce sujet dans un précédent article, alors je ne vais pas m'étendre ici. Sachez juste que faire semblant de trouver ça "cool" alors que j'entends pour la cinquantième fois cette saison parler de photo, de technique, et de matériel, demande pas mal de patience.

Et bien sûr, il y a toujours le célibataire de l'événement.

Parfois, ils sont plusieurs, mais ces gars-là semblent convaincus que je suis là pour chercher l'âme sœur.

Ils essaient de m'impressionner avec leurs histoires, leurs sourires charmeurs, et leurs approches maladroites.

Là encore, il me faut rester polie, ne surtout pas leur faire ressentir la lourdeur de leur démarche.

Après tout, garder son calme en toutes circonstances fait aussi partie de mon métier.

Le dance floor

Imaginez-vous au beau milieu de la piste de danse, submergé par les odeurs de transpiration et essayant de naviguer entre les invités survoltés. Vous l'avez?

C'est là que chaque pas est une prise de risque pour vos pieds déjà meurtris, écrasés pour la cinquantième fois par des danseurs déchaînés.

Et puis, il y a toujours ce moment critique : quand LE danseur de la soirée, entendant SA chanson, débarque avec une telle ferveur qu'il vous éclabousse de contenu de verre en vous bousculant.

Vous devez sourire et applaudir comme si "Despacito" ou "Marry You" étaient les plus grandes révélations musicales de votre vie, alors que vous les entendez chaque semaine, tout en exprimant un amour évident pour Céline Dion qui résonne à travers les enceintes.

Anticiper une "champagne shower" imminente pour protéger votre équipement devient un art en soi, tout comme négocier avec le DJ pour qu'il évite d'utiliser les lumières mouchetées vertes qui pourraient gâcher les images de l'ouverture de bal parfaite que vos mariés attendent avec tant d'impatience. 

La photographie est un art, et être photographe est un métier...

À travers cet article, j'ai souhaité vous dévoiler l'envers du décor de ma vie de photographe, loin des clichés glamour et des sourires figés. Derrière chaque image parfaite se cachent des heures d'effort, de patience et parfois même de stress. Du matériel lourd aux imprévus inattendus, chaque événement est une aventure où la créativité se mêle à la résilienceLe métier de photographe est en déclin, bien que de plus en plus de personnes s'y lancent...

Combien tentent de combiner leur emploi principal avec la photographie ? Trop! Combien cherchent à échanger leurs photos pour une gloire passagère ? Trop!

Mais combien vivent réellement de la photographie ? Trop peu!

Hier soir, lors de l'événement que je couvrais, un homme sur la plage m'a abordé: dans la région pour Juillet et Août, il m'a dit être saisonnier et souhaitait proposer les services de son drone à mon client. Ce dernier a refusé catégoriquement. Il fait appel à mes services chaque année pour couvrir son événement annuel, et il estime que ce genre de pratique non déclarée et opportuniste, et sans autorisation, nuit gravement à ma profession. Cela peut sembler exagéré, mais mon client, un homme d'affaires éclairé vivant à l'étranger, comprend comment de telles pratiques nuisent à l'avenir de notre métier.

L' activité de photographe fascine beaucoup de gens. Beaucoup envisagent de se reconvertir dans ce domaine en se basant sur des idées préconçues.« Devenir photographe de mariage? C'est juste quelques week-ends par an avec beaucoup d'argent à la clé »... Mais en réalité, cela implique tout le travail de marketing pour trouver et satisfaire les clients, le savoir-faire pour gérer les prestations de A à Z, et un investissement financier dans le matériel, les logiciels, l'informatique, les déplacements, sans oublier l'investissement humain : le temps consacré aux photos, les réunions préparatoires avec les mariés, le post-traitement... Pour tout cela, on ne s'invente pas photographe, et il faut y consacrer beaucoup de temps, pas uniquement les week-ends.

Bien que certains puissent la pratiquer en loisir, rien ne remplace le talent d'un photographe professionnel pour sublimer son sujet.

En résumé, il n'y a rien de magique, juste beaucoup de travail.Beaucoup sont attirés par le rêve mais ne durent pas. Cela laisse la place aux professionnels qui, malgré une concurrence souvent déloyale, savent valoriser leur métier à sa juste mesure.

Et en ce qui me concerne, c'est votre confiance et vos sourires qui donnent sens à mon métier depuis toutes ses années. 

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